Radio Okapi, BBC, RFI, Top Congo, France 24, Actualite.cd, aucun média n’est passé à côté de cette nouvelle : la condamnation, le jeudi 07 novembre, par la Cour pénale internationale (CPI), à 30 ans de prison pour Bosco Ntanganda. C’est peut-être terminé pour celui qui se faisait appeler Terminator. Mais qui est réellement cet homme qui aura marqué une bonne partie de l’histoire de la RDC.
Enias est son nom de baptême adventiste. Il est né au Rwanda, mais a grandi dans le Masisi au Nord-Kivu, dans l’Est de la RDC. L’histoire d’amour entre Enias et les groupes armés débute alors qu’il n’est qu’adolescent. Il avait 17 ans lorsqu’il répond à l’appel du Front patriotique rwandais (FPR), la rébellion conduite par Paul Kagame et Fred Rwigema. Il y combat jusqu’à la fin du génocide rwandais en 1994, un épisode de sa vie dont il est d’ailleurs très fier. « Je suis de ceux-là qui ont mis fin à ce génocide », expliquait-il en 2017, au cours de son procès à La Cour pénale internationale. À la fin du génocide, il décide de traverser la frontière et de retourner dans l’Est du Congo (Zaïre) pour y mener une autre guerre, celle qui combat la dictature de Mobutu et finit par installer Laurent-Désiré Kabila au pouvoir.
C’est à partir de 1998 que Bosco Ntanganda acquiert la réputation de « Terminator ». A l’époque, il combat sous le label du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). D’un groupe armé vers un autre, il va se retrouver entre 2002 et 2005 comme chef des opérations militaire de l’Union des patriotes congolais (UPC). L’union chapeauté par Thomas Lubanga et dont Terminator va incarner le bras militaire. En mars 2005, Thomas Lubanga sera arrêté et détenu en RDC avant d’être transféré une année plus tard à la Haye où il sera jugé et condamné à 14 ans de prison. Dans l’affaire Lubanga, Bosco Ntanganda est aussi pointé du doigt par la CPI. Mais il réussit à échapper aux mailles de la justice et rallie un autre groupe armé, le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Laurent Nkunda.
Au CNDP, Bosco Ntanganda est le chef d’état-major. C’est à ce poste-là qu’il va finalement décider en 2009 d’entamer des négociations avec le gouvernement congolais. Ces négociations conduiront le 23 mars 2009 à la signature d’un accord de paix qui prévoit entre autres que le CNDP se muerait en parti politique et qu’une amnistie sera accordée aux ex-combattants qui se sont engagés à déposer les armes. Les autres seront reversés dans l’armée régulière congolaise. C’est le cas de Bosco Ntanganda qui dans le rang des Forces armées de la RDC aura le grade de Général et la fonction de sous-commandant des opérations militaires dans l’est de la RDC. De 2009 à 2012, c’est la période de grâce pour Ntanganda, qui est protégé par le régime de Kinshasa. À cette époque, malgré la pression des ONGs locales et internationales, le gouvernement congolais le considérait comme un partenaire important pour la paix. « L'arrêter ne ferait que compromettre le processus de pacification », répétaient souvent les autorités congolaises.
Mais l’armée régulière, pour quelqu’un qui a passé toute sa vie dans la rébellion, n’était pas gagné d’avance. En 2012, il reproche au gouvernement congolais de ne pas respecter les termes de l’accord du 23 mars. Il provoque une mutinerie et retourne dans la rébellion. C’est la naissance du M23, le dernier groupe rebelle dans lequel le Terminator va devoir exercer avant sa fin soudaine.
Dans le collimateur de la CPI
Depuis 2006 dans l’affaire Lubanga, Bosco Ntanganda est sous mandat d’arrêt international à cause de son rôle au sein de l’UPC. La CPI le poursuit pour crime de guerre consistant à enrôler des enfants de moins de 15 ans dans des groupes armés. Six ans après le premier mandat d’arrêt émis contre lui, Bosco Ntanganda se retrouve à nouveau sous le coup d’un autre mandat d’arrêt délivré toujours par la CPI. Cette fois, il est accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Les troupes sous le commandement du Terminator ont commis plusieurs atrocités dans la région du Kivu. Human Rights Wacth a listé de manière plus ou moins exhaustives ces atrocités qui couvre une période presque 10 ans, de 2003 à 2013 à la reddition de Bosco Ntanganda.
Après sa défection de l’armée congolaise, les choses se compliquent pour Bosco Ntanganda. La rébellion qu’il dirige plonge dans une guerre de chefs dans laquelle le pouvoir du Terminator s’amenuise peu à peu. Il y a, au sein du M 23, des pro et des anti Ntanganda. La guerre intestine entre les deux factions pousse Bosco Ntanganda dans ces derniers retranchements. Dans la nuit du 17 mars 2013, Bosco Ntanganda se retrouve obligé de franchir la frontière vers le Rwanda. À Kigali, il ne peut pas obtenir un soutien car quelques semaines plutôt, le Rwanda et dix autres pays africains avaient signé, sous l’égide de l’ONU à Addis-Abeba, un accord destiné à ramener la Paix à l’Est de la RDC.
L’étau se resserre sur le désormais ex-chef rebelle. Le lundi 18 mars 2013, Bosco Ntanganda se rend à l’ambassade des États-Unis à Kigali et demande d’être transféré à la CPI. Six ans plus tard, la peine tombe : 30 ans de prison. Ses avocats ont interjeté appel.